CLIMAT. Cet été, deux vagues de canicule ont traversé la France. La capitale a battu des records de chaleur, avec un thermomètre grimpant jusqu'à 42°. Dans les logements comme dans les espaces publics, des solutions permettent pourtant de limiter les effets de la canicule à l'échelle du quartier.
En 2019, l'été a été chaud, notamment à Paris où l'omniprésence de la minéralité a accentué les effets de la canicule. Des solutions de rafraîchissement existent pourtant, et ont été présentées le 16 octobre 2019 par l'Agence parisienne du climat (APC), pour qui l'îlot de fraîcheur doit désormais monter à l'échelle du quartier.
Dans les années qui viendront, la question du rafraîchissement urbain sera de plus en plus prégnante. Une nécessité qui s'appuie sur les prévisions météorologiques en lien avec le réchauffement climatique. D'ici 2040, les épisodes de canicule seront "quatre fois plus fréquents, avec une intensité augmentée d'1,2 degré", a indiqué Raphaëlle Kounkou-Arnaud, adjointe au responsable Data science et Consultance chez Météo France.
En 2100, le scénario optimiste -conditionné par l'engagement de tous les pays à l'accord de la COP21 et des mesures immédiates- prédit un réchauffement de 2° supplémentaires, contre 6 à 7° pour le scénario le plus pessimiste.
Matériaux biosourcés et végétalisation ciblée
Des prévisions qui vont au-delà des alertes de santé publique, et posent la question de l'adaptation des villes au réchauffement climatique, à commencer par Paris. Cela commence dans les logements, avec la problématique d'isolation thermique. "La bonne nouvelle, c'est que la solution pour bien vivre dans son logement l'été est la même que pour l'hiver", rassure Frédéric Delhommeau, directeur habitat et rénovation à l'APC.
Sur les toitures, les façades comme les fenêtres des immeubles parisiens, "les solutions sont d'autant plus intéressantes lorsqu'on travaille à partir des matériaux biosourcés", affirme Frédéric Delhommeau. Leur avantage : un déphasage qui "permet de décaler le moment de chauffe intérieure par rapport aux moments les plus chauds de la journée", et leur capacité "à mieux doser la ventilation".
Cet été, Julia Borsatto l'a passé au frais, dans son immeuble rue Ernestine dans le 18e arrondissement de Paris. Dans cet immeuble de 23 logements, époque fin XIXe, les copropriétaires ont voté une isolation par l'extérieur à base de chaux et de liège, vanté pour sa faible épaisseur sur façade, et qui a permis un gain en performance énergétique de 35%, avec un changement d'étiquette de G à E. "Nous avons été très surpris par le résultat, notamment le changement brutal en passant à la température extérieure", témoigne la propriétaire.
Matériau peu courant dans l'isolation thermique, le liège se situe plutôt dans la fourchette haute des prix. Mais à l'image d'autres matériaux biosourcés, "peu d'artisans connaissaient ce procédé, ça a été un casse-tête car ils ne savaient pas comment l'appliquer au début", confie Julia Borsatto, dont la copropriété avait refusé à l'unanimité une ITE en polystyrène.
Exploiter les parties oubliées des immeubles
Outre l'isolation thermique, d'autres solutions pourraient permettre de rafraichir les logements naturellement, voire le quartier même. L'Agence parisienne du climat est notamment revenue sur le dispositif "Mostiglass", une moustiquaire qui, en plus de barrer le passage aux nuisibles volants, permet aussi de rafraîchir l'air intérieur. Par une configuration bien précise des trous, la moustiquaire permet un "effet Venturi", et de faire perdre quelques degrés à l'air extérieur.
Peu exploitées, les cours d'immeubles et les conduits de cheminée des édifices Haussmanniens pourraient aussi changer d'usage au service du rafraîchissement naturel. Lauréat de l'appel à projets FAIRE 2019, le cabinet d'architectes Ylé propose de végétaliser les cours intérieures, et de les raccorder aux canaux de cheminées permettrait de distribuer un air plus frais, et moins pollué dans les logements.
La végétalisation fait souvent partie de l'équation du rafraîchissement urbain, à condition qu'elle soit alimentée en circuit fermé. A Aubervilliers, la designer en environnement Elodie Stephan expérimente avec Icade huit modules dans le cadre du projet "Bocage urbain". L'idée consiste à recréer l'écosystème du bocage, en connectant des modules végétalisés à des conduits d'eaux pluviales, récoltées dans des réseaux reliés aux modules, ou au sol. "En traitant une seule contrainte, celle des eaux pluviales, on contribue à l'ensemble des enjeux environnementaux de la ville", fait valoir Baptiste Laurent, responsable Open innovation chez Icade.