OPINIONS. Pour Dominique Sutra Del Galy, président de la Fédération Cinov, il est faux de dire que les contrats globaux constituent la formule magique permettant de construire les bâtiments performants de demain. Explications.
Il y a quelques semaines, Gilles Duroux, président de la commission efficacité énergétique du Serce, assurait que les contrats globaux constituaient "la seule façon" de construire les bâtiments de demain, en respectant les exigences réglementaires notamment en termes d'efficacité énergétique. Des propos qui ont amené Dominique Sutra del Galy, président de la Fédération Cinov, à réagir. "Le marché global est loin d'être la solution unique existante", explique-t-il à Batiactu. "L'opération doit s'y prêter, en matière de taille et du niveau d'exigence demandé."
Le maître d'ouvrage doit être rodé
Il insiste également sur la connaissance du dispositif par la maîtrise d'ouvrage. "Si celle-ci n'est pas assez rodée dans l'accompagnement de la conception-réalisation, ses aspects juridiques, l'organisation du dialogue compétitif, les contrats globaux ne sont pas plus efficaces que la loi Mop, et ne constituent certainement pas une procédure plus rapide."
L'ingénieur a par ailleurs identifié ce qu'il considère comme un effet pervers dans ce type de mode de passation de marché : "Nous voyons fréquemment apparaître la situation où l'entreprise générale prend en charge une partie de l'ingénierie générale. Ce qui trahit l'esprit d'associer les acteurs autour du projet. L'ingénierie doit rester indépendante." La conception-réalisation aurait aussi comme défaut de traiter les ingénieurs comme s'ils étaient des entreprises de construction. "C'est une position intenable : l'ingénieur devient responsable des résultats et non des moyens. Cela peut déboucher sur des pénalités très importantes, à hauteur de celles auxquelles sont soumises les entreprises. Or, nous ne sommes pas responsables des conséquences d'une mauvaise exploitation d'un bâtiment ou de son mauvais usage."
Est-ce que, comme l'estime l'avocat Cyrille Charbonneau, le Bim pourrait "sauver" la maîtrise d'œuvre, menacée par les contrats de conception-réalisation ? Nous avons posé la question à Cécile Jolas, chef de projet à la plateforme Tipee, spécialiste en maquette numérique. "J'aurais tendance à dire qu'en matière de maquette numérique, les problèmes se posent justement lorsque l'on n'est pas en contrat global !", explique-t-elle à Batiactu. "En marché classique, il est difficile de maintenir la continuité de la maquette numérique. Si l'on n'est pas en entreprise générale, personne ne sait faire pour l'instant." Pas même du côté de la maîtrise d'œuvre ? Si Cécile Jolas reconnaît que ces acteurs ont naturellement une vision transversale des projets, très peu d'entre eux ont le bagage suffisant pour mettre la main sur la maquette. "Nous sommes régulièrement appelés par de gros cabinets de maîtrise d'œuvre qui ne savent pas faire." Une situation probablement appelée à évoluer au fur et à mesure du développement de la maquette numérique.