EMPRUNTS. Après la Banque de France en juin, c'est au tour du Haut Conseil de stabilité financière d'émettre quelques inquiétudes sur les crédits immobiliers, entre des taux d'intérêt historiquement bas, des marges bancaires presque nulles et un taux d'effort des ménages qui avoisine les 30%.
Quand certains se réjouissent du fléchissement continu des taux d'intérêt pour les emprunts immobiliers, le Haut Conseil de stabilité financière appelle, lui, à rester vigilant sur les effets de cette conjoncture à une échelle macro-économique.
Dans une note parue le 1er octobre 2019, l'autorité macroprudentielle pointe "les pratiques d'octroi (qui) s'assouplissent de manière progressive mais continue, avec notamment une augmentation des pratiques a priori les plus risquées". Derrière leur tendance baissière, les taux d'intérêt cachent en effet un allongement des durées d'endettement et des taux d'effort des ménages qui correspondent en moyenne à 30% des revenus, avec une hausse de la part supérieure à 35%.
Tout autant de signes d'alerte lancés par le HCSF, dans la continuité de la Banque de France, qui, en juin dernier, s'était dite "vigilante" face à l'assouplissement des conditions d'octroi de crédits immobiliers. La France est d'ailleurs récipiendaire d'une alerte du Conseil européen du risque systémique (Cers) qui avertit de "vulnérabilités à moyen terme du secteur de l'immobilier résidentiel pouvant constituer un risque systémique pour la stabilité financière".
Un modèle français plutôt robuste
"Le HSCF réitère l'attention qu'il porte à la dynamique des crédits immobiliers, à leur tarification, à la rentabilité de la production nouvelle ainsi qu'aux conditions d'octroi", peut-on lire dans la note de l'autorité financière. Du côté des ménages, le HSCF note que les taux d'intérêts historiquement bas n'auront pas eu d'impact sur la trajectoire haussière des prix immobiliers. Résultat: une hausse de l'endettement qui impacte progressivement les revenus des ménages.
Scénario catastrophe pour le Haut Conseil de stabilité financière: une hausse du chômage en France emporterait avec elle une hausse de la sinistralité et une baisse de la consommation des ménages. Il rassure néanmoins quant au modèle robuste de l'endettement à la française, qui s'appuie sur des emprunts à taux fixe et une protection sociale face au chômage qui préserve les revenus à court terme.
Halte également aux propriétaires investisseurs et au "sentiment de sécurité" qu'engendre la hausse des prix immobiliers. A trop thésauriser leur capital dans la pierre, les investisseurs "affectent la productivité" d'autres secteurs avec un "effet négatif sur la croissance".
Eviter une nouvelle vague de renégociation de crédits
A l'échelle des banques, l'autorité macroprudentielle craint la "dégradation des marges sur la production depuis 2012". Jusqu'en 2016, la marge brute n'a cessé de dégringoler pour atteindre en 2017 un niveau de 0,8%, "historiquement bas" selon le HCSF. En compensation, les banques grignoteraient dans "d'autres activités facilitées par le recrutement de clients à l'occasion de prêts immobiliers, voire par la fourniture d'assurance liées aux prêts ou aux biens financés".
Dans un contexte de taux d'intérêts réduits, les banques ont également dû renégocier un certain nombre d'emprunts. Pour le HSCF, une "nouvelle vague de renégociations" constituerait un "risque" de fragilisation supplémentaire du secteur bancaire.