La maquette numérique est en plein essor en France, mais l'utilisation de cet outil nécessite la modélisation de très nombreuses solutions techniques utilisées dans la construction, notamment dans l'étanchéité. Les industriels participent donc à l'enrichissement de bases de données afin de les mettre à disposition des architectes. Explications avec Eric Lainé, directeur Prescription chez Siplast, et Bertrand Gasnier, responsable chez Polantis.
"Des architectes de bon niveau qui sont engagés dans le BIM nous ont expliqué la nécessité, pour les industriels, d'intégrer la boucle très en amont en fournissant des données, de la matière", déclare le directeur de la Prescription chez Siplast, Eric Lainé. Selon lui, "ne pas être dans cette démarche de maquette numérique, c'est être en recul". L'entreprise spécialisée dans l'étanchéité s'est donc tournée vers l'agence Polantis, qui intègre les produits réels dans le monde virtuel, afin de modéliser une première gamme.
"Il ne s'agit pas simplement d'une 3D, mais il y a un système et des paramètres à intégrer avec beaucoup d'intelligence : outre la surface couvrante qui ne représente que la moitié des données, il faut prendre en compte les joints, les évacuations pluviales et autres points singuliers", précise Eric Lainé. Un travail a donc été mené, pendant six mois, afin de collecter les données, issues des fiches techniques, puis de modéliser le complexe d'étanchéité. "Les échanges ont été importants pour construire le fichier", poursuit le directeur de la Prescription. Siplast a choisi, pour premier objet, la gamme Silver, commercialisée depuis un an. Cette solution est un complexe bitume en bicouche présentant une importante épaisseur et une valeur ajoutée forte. "Garantie pour durer 20 ans et munie de puces RFID afin d'assurer sa traçabilité, c'était donc un choix qui faisait sens pour une modélisation BIM", assure-t-il. D'autant que cette gamme est prévue pour couvrir environ 80 % des demandes du marché de l'étanchéité sur béton.
Proposer des modèles très précis aux architectes
De leur côté, les architectes demanderaient régulièrement aux industriels d'enrichir les bases de données liées aux BIM. "Ils ont une multitude de produits et procédés à connaître. Ils ont donc besoin d'informations, à tout instant, avec beaucoup de précision", estime Bertrand Gasnier. Le mouvement est donc amorcé chez différents acteurs des matériaux et solutions de construction, comme Soprema qui a nommé un responsable pour un projet équivalent à celui de Siplast. "Dans les années qui viennent, l'ensemble des gammes sera intégré à la démarche BIM, y compris l'isolation acoustique intérieure, ce qui est attendu par les architectes et bureaux d'études", conclut Eric Lainé. De quoi prendre une certaine avance vis-à-vis de la concurrence, un atout précieux si l'on considère la généralisation de la maquette numérique comme la grande tendance à venir du secteur de l'architecture.
Un directive européenne de janvier 2014 permet aux 28 Etats membres de rendre obligatoire le recours à la maquette numérique pour les marchés publics, dès 2016. La France, premier marché du BTP, du continent, et la Grande-Bretagne, 3e marché, ont déjà engagé cette réforme. Les pays scandinaves et les Pays-Bas sont également en avance, tandis que l'Allemagne a prévu de faire la bascule en 2018. En dehors de l'UE, les Etats-Unis ont lancé la démarche depuis 2003, tandis qu'en Asie, Singapour et Hong Kong font figure de précurseurs. Cette mise en œuvre du BIM dans les commandes publiques entraînera une généralisation, y compris dans le privé.