BREXIT.Alors que la France craint une "sortie dure" du Royaume-Uni de l'Union européenne par faute d'accord, le gouvernement doit faire adopter un projet de loi visant à déroger aux réglementations en matière de construction et d'aménagement. Une mesure qui provoque l'ire des architectes qui dénoncent un détricotage dans l'urgence.

C'est un projet de loi qui, en pleine crise des gilets jaunes, est presque passé inaperçu. Le 2 janvier dernier, le ministère de la Transition écologique et solidaire a mis en ligne une consultation publique portant sur des "mesures dérogatoires pour la réalisation des aménagements urgents nécessaires au rétablissement des contrôles à la frontière en vue de la sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne".

 

Le projet de loi, composé d'une ordonnance et d'un décret d'application est, selon le ministère, un outil pour la mise en place des "procédures simplifiées et temporaires applicables aux travaux en vue de la construction ou de l'aménagement en urgence de locaux, installations ou infrastructures".

 

Cette urgence a été réitérée ce jeudi par le Premier ministre Edouard Philippe dans un communiqué où il rappelle que "la France, même si elle souhaite toujours éviter ce scenario, se prépare à une sortie du Royaume-Uni sans accord de retrait le 30 mars 2019". Une sortie sèche du Royaume-Uni amènerait l'Hexagone à renforcer ses contrôles aux frontières, avec l'installation d'infrastructures en conséquence qui devront être prêtes au 30 mars prochain.

 

Mais pour le Conseil national de l'ordre des architectes, ces constructions à la hâte facilitées par un régime dérogatoire, feront de "l'architecture, des sites patrimoniaux et des paysages français (les) futures victimes des conséquences du Brexit".

 

Remise en l'état "illusoire"

 

L'ordonnance ministérielle portant sur les différentes mesures dérogatoires dispense pêle-mêle des autorisations environnementales, de l'obligation de concours et réduit les délais d'instruction des demandes d'autorisation de construction. Elle fait également la part belle à la conception-réalisation dans la mesure où "les acheteurs peuvent confier à un opérateur économique une mission globale portant sur la conception, la construction, l'aménagement des locaux, installations ou infrastructures requis". Pour le Cnoa, ce marché "public global sectoriel" privilégierait avant tout les "grands groupes de BTP".

 

De ces mesures dérogatoires sont néanmoins exclus les projets situés sur des sites naturels classés. L'ordonnance précise par ailleurs que les infrastructures réalisées "peuvent être implantées pour une durée maximale de deux ans" avant que la zone les ayant accueillis soit "remise en état dans un délai de six mois". L'on pourrait ainsi croire que les anciennes infrastructures laisseraient place à des structures mieux pensées, mais "cette prétendue remise en l'état est totalement illusoire", peste le Cnoa.

 

Car les bâtisses dédiées aux services de douane pourront être régularisées "dans les conditions de droit commun prévues par le code de l'urbanisme", peut-on lire dans l'article 2 de l'ordonnance. C'est "la demande de permis de construire déposée deux ans après la construction", ironise le Cnoa.

 


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