Treize ans après le début du chantier du barrage des Trois Gorges, au coeur de la Chine et sur le plus grand fleuve du pays, les travaux de génie civil s'achèvent pour l'un des plus pharaoniques ouvrages de ce type jamais construit.
En 1993, le premier coup de pioche était donné sur les chemins d'accès au site, sur le Yangtze (6.360 kilomètres), aussi nommé tout simplement «long fleuve» (Changjiang).
En juin, la partie génie civile devrait être achevée: les derniers mètres de route sur le barrage seront bétonnés et les bassins de rétention au pied de l'ouvrage, établis à l'origine pour permettre l'édification à sec de la muraille, détruits.
«Nous allons terminer un an en avance. Fin 2008, ce sera fini», centrales comprises, dit, avec fierté, un des responsables du projet, Huang Hongyong, en balayant de la main les 2.310 mètres de longueur du barrage, surplomblant les eaux désormais canalisées.
«Le but premier de ce barrage, c'était le contrôle des crues», explique Qin Xixiang, ingénieur en chef adjoint de la China Yangtze Three Gorges Project Company, la société propriétaire.«Avant, nous avions statistiquement des crues tous les dix ans; maintenant ce sera tous les cent ans». Et si l'édification du barrage a demandé l'évacuation de 1,13 million de personnes, parfois manu militari, c'est pour mieux protéger 15 millions d'autres, argumentent les promoteurs du projet.
En cette période plutôt sèche, le déversoir central, encadré par les deux séries de turbines et alternateurs géants, est au repos. Nulle eau ne s'y glisse. Mais cette tranquillité masque les caprices d'un fleuve pouvant passer d'un débit de 9.000 m/secondes à 80.000, voire 110.000, et d'engloutir des dizaines de milliers de personnes: 145.000 victimes en 1931, 142.000 morts en 1935, 33.000 en 1954.
Cette litanie de catastrophes fit très tôt surgir l'idée de domestiquer le fleuve nourricier. Sun Yat-sen, père de la République, l'envisagea en 1918. Mais il fallut attendre le début des années 90 pour que l'impulsion décisive soit donnée. La Chine avait alors entamé sa folle croissance économique, vorace en énergie, et éprouvait l'urgence de se doter de nouvelles ressources. Le projet des Trois Gorges a été à l'origine conçu pour produire près de 85 milliards de KWH par an d'électricité, acheminable dans un rayon de mille kilomètres.
Sur sa rive gauche, 14 groupes de 700 mégawatts (MW) tournent déjà. C'est à côté de cette centrale qu'a été aménagé un ascenseur à bateaux, pour hisser les navires de 3.000 tonnes. Les plus gros emprunteront l'écluse à cinq niveaux d'un bras voisin. «Au moins, dit Qin, les navires pourront désormais remonter jusqu'à Chongqing», 660 km plus à l'ouest, «au lieu de rester bloqués en aval à la saison sèche. Economiquement, c'était vital».
Rive droite, 12 autres groupes de 700 MW sont en cours de fabrication et d'installation. Au coeur du barrage, les hommes s'affairent autour des excavations qui accueilleront les turbines de 25 mètres de diamètre.
Quelque 8.000 personnes, dispersées dans ces volumes gigantesques, travaillent encore sur un ouvrage qui, au plus fort des travaux, en employait 30.000. Pour le moment à peu près équivalent à Itaïpu, la plus grande centrale hydroélectrique du monde en opération, située à la frontière du Brésil et du Paraguay, Trois Gorges à terme lui damera le pion.
D'ici à la fin de l'année, un nouvel appel d'offres devrait être lancé pour rajouter une nouvelle centrale de six fois 700 MW, souterraine, jouxtant celle de la rive droite. Le barrage deviendra alors «le plus grand au monde», selon ses propriétaires. En 2003, les Chinois estimaient l'investissement à quelque 27 milliards de dollars (180 milliards de yuans), mais des estimations occidentales parlent de 40 à 50 milliards.
Le barrage des Trois Gorges en chiffres
Longueur : 2.309,5 mètres
Volume : 27 millions de mètres cubes de béton
Dénivelé : quelque 120 mètres entre le réservoir en amont et le niveau de la rivière en aval, elle-même à 64 mètres au-dessus du niveau de la mer
Hauteur de la chute: 80,6 mètres, maximum 113 m
Réservoir : 660 kilomètres, jusqu'à Chongqing, dans la province du Sichuan
Capacité de cette retenue d'eau: 39,3 milliards de m3, sur 1.084 km2
Capacité de navigation : flotte de 10.000 tonnes
En juin, la partie génie civile devrait être achevée: les derniers mètres de route sur le barrage seront bétonnés et les bassins de rétention au pied de l'ouvrage, établis à l'origine pour permettre l'édification à sec de la muraille, détruits.
«Nous allons terminer un an en avance. Fin 2008, ce sera fini», centrales comprises, dit, avec fierté, un des responsables du projet, Huang Hongyong, en balayant de la main les 2.310 mètres de longueur du barrage, surplomblant les eaux désormais canalisées.
«Le but premier de ce barrage, c'était le contrôle des crues», explique Qin Xixiang, ingénieur en chef adjoint de la China Yangtze Three Gorges Project Company, la société propriétaire.«Avant, nous avions statistiquement des crues tous les dix ans; maintenant ce sera tous les cent ans». Et si l'édification du barrage a demandé l'évacuation de 1,13 million de personnes, parfois manu militari, c'est pour mieux protéger 15 millions d'autres, argumentent les promoteurs du projet.
En cette période plutôt sèche, le déversoir central, encadré par les deux séries de turbines et alternateurs géants, est au repos. Nulle eau ne s'y glisse. Mais cette tranquillité masque les caprices d'un fleuve pouvant passer d'un débit de 9.000 m/secondes à 80.000, voire 110.000, et d'engloutir des dizaines de milliers de personnes: 145.000 victimes en 1931, 142.000 morts en 1935, 33.000 en 1954.
Cette litanie de catastrophes fit très tôt surgir l'idée de domestiquer le fleuve nourricier. Sun Yat-sen, père de la République, l'envisagea en 1918. Mais il fallut attendre le début des années 90 pour que l'impulsion décisive soit donnée. La Chine avait alors entamé sa folle croissance économique, vorace en énergie, et éprouvait l'urgence de se doter de nouvelles ressources. Le projet des Trois Gorges a été à l'origine conçu pour produire près de 85 milliards de KWH par an d'électricité, acheminable dans un rayon de mille kilomètres.
Sur sa rive gauche, 14 groupes de 700 mégawatts (MW) tournent déjà. C'est à côté de cette centrale qu'a été aménagé un ascenseur à bateaux, pour hisser les navires de 3.000 tonnes. Les plus gros emprunteront l'écluse à cinq niveaux d'un bras voisin. «Au moins, dit Qin, les navires pourront désormais remonter jusqu'à Chongqing», 660 km plus à l'ouest, «au lieu de rester bloqués en aval à la saison sèche. Economiquement, c'était vital».
Rive droite, 12 autres groupes de 700 MW sont en cours de fabrication et d'installation. Au coeur du barrage, les hommes s'affairent autour des excavations qui accueilleront les turbines de 25 mètres de diamètre.
Quelque 8.000 personnes, dispersées dans ces volumes gigantesques, travaillent encore sur un ouvrage qui, au plus fort des travaux, en employait 30.000. Pour le moment à peu près équivalent à Itaïpu, la plus grande centrale hydroélectrique du monde en opération, située à la frontière du Brésil et du Paraguay, Trois Gorges à terme lui damera le pion.
D'ici à la fin de l'année, un nouvel appel d'offres devrait être lancé pour rajouter une nouvelle centrale de six fois 700 MW, souterraine, jouxtant celle de la rive droite. Le barrage deviendra alors «le plus grand au monde», selon ses propriétaires. En 2003, les Chinois estimaient l'investissement à quelque 27 milliards de dollars (180 milliards de yuans), mais des estimations occidentales parlent de 40 à 50 milliards.
Le barrage des Trois Gorges en chiffres
Longueur : 2.309,5 mètres
Volume : 27 millions de mètres cubes de béton
Dénivelé : quelque 120 mètres entre le réservoir en amont et le niveau de la rivière en aval, elle-même à 64 mètres au-dessus du niveau de la mer
Hauteur de la chute: 80,6 mètres, maximum 113 m
Réservoir : 660 kilomètres, jusqu'à Chongqing, dans la province du Sichuan
Capacité de cette retenue d'eau: 39,3 milliards de m3, sur 1.084 km2
Capacité de navigation : flotte de 10.000 tonnes
