Cible d'une plainte en mars dernier de l'association Sherpa qui dénonçait le "travail forcé" et les conditions d'emploi à l'encontre des migrants employés sur ses chantiers au Qatar en vue du Mondial de football prévu en 2022, le groupe de BTP Vinci réclame en justice 300.000 euros de dommages et intérêts pour diffamation.
Après la plainte déposée en mars dernier par l'ONG Sherpa, le groupe Vinci et Vinci Construction réfutent en bloc les accusations de travail forcé sur les chantiers au Qatar, en portant plainte pour diffamation. Au total, ils réclament 300.000 euros de dommages et intérêts, ainsi qu'une insertion du jugement dans dix journaux, pour un total qui pourrait atteindre 200.000 euros.
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L'association Sherpa avait déposé plainte le 23 mars 2015 au parquet de Nanterre, contre Vinci Construction Grands Projets (VCGP) pour "travail forcé" et "réduction en servitude", dans le cadre des nombres chantiers de génie civil liés à l'organisation du Mond
ial 2022 de football. Les chantiers visés concernent notamment le projet de tramway de Lusail, du métro de Doha et celui du tronçon d'autoroute de 47 km, la New orbital Highway.
"La plus grande publicité contre Vinci"
Pour Vinci, "l'annonce du dépôt de plainte a été soigneusement orchestrée, afin de donner aux graves accusations portées contre le groupe Vinci la plus grande publicité", nous avait confié le porte-parole de Vinci en mars dernier. Cette citation visant Sherpa porte notamment sur la pétition lancée sur le site de l'association, des passages d'un communiqué, ainsi que de propos tenus par plusieurs de ses dirigeants. Outre Sherpa, la citation vise son président, l'avocat William Bourdon, sa directrice, Laetitia Liebert ainsi que sa responsable juridique, Marie-Laure Guislain.Et Vinci de préciser : "À plusieurs reprises, nous avons ouvert la porte de nos chantiers aux syndicats et représentants du personnel, aux ONG internationales, et aux journalistes. Ils ont pu constater que nous faisons mieux que respecter le droit local du travail et les droits fondamentaux. Chaque collaborateur de QDVC bénéficie d'un libre accès à son passeport et les temps de travail et de repos sont strictement observés, on respecte donc le droit du travail local et les droits fondamentaux."
"Ouvrir un débat public sur le respect des droits fondamentaux des travailleurs."
De son côté, l'association Sherpa reste "confiante" pour la suite, signale-t-elle dans un communiqué, publié ce jeudi 16 avril : "Nous avons les preuves de ce que nous avançons." Et d'ajouter : "Nous nous réjouissons que Vinci nous offre, grâce à sa plainte une autre occasion d'ouvrir un débat public sur le respect des droits fondamentaux des travailleurs sur ses chantiers au Qatar."
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Une réaction qui ne surprend pas Marie-Laure Guislain, responsable du contentieux au pôle Globalisation et Droits humains de l'association Sherpa, interrogée par Batiactu en mars dernier : "On s'y attendait, c'est habituel du côté des multinationales qui utilisent fréquemment ce genre de procédure coûteuse, pour décourager les plaignants moins solides financièrement."