Le temple de Palmyre en Syrie émerveille depuis des années. Les saccages de Daech sur le site classé au patrimoine mondial de l'Unesco désolent beaucoup le monde. Pour espérer voir un jour le site reconstruit, une start up co-fondée par un architecte français propose une solution innovante. Explications.
Non un monument historique n'est pas forcément éternel. Les dégâts causés sur le temple de Palmyre en Syrie en sont la preuve. Mais alors, comment éviter que des sites archéologiques disparaissent ? Face à cette question, Yves Ubelmann a peut-être trouvé une solution. Architecte de formation, il a collaboré pendant des années avec des archéologues au Proche-Orient. Constatant la disparition progressive du patrimoine dans ces zones, où le contexte est parfois compliqué, et le peu de documentation dont disposent les pays sur leurs monuments, Yves Ubelmann s'est alors intéressé aux nouvelles technologies de documentation du patrimoine. Et de sa rencontre avec Philippe Barthélémy, spécialiste des drones, est née leur start up Iconem.
Depuis 2013, l'entreprise ambitionne de préserver la mémoire du patrimoine menacé grâce aux dernières innovations technologiques. Comment ? En prenant des milliers de photos avec un drone. "Grâce à nos relevés de terrain et à nos algorithmes de retraitement visuel, nous sommes en mesure de produire de véritables doubles numériques des vestiges ou zones archéologiques. Nous offrons ainsi à la communauté scientifique et au grand public un moyen innovant d'explorer de célèbres sites de notre patrimoine mondial" explique l'entreprise.
Une technique rapide et précise
C'est le cas pour le site de Palmyre, en Syrie. Dès 2013, les fondateurs d'Iconem proposent aux scientifiques du pays de leur apporter un support technique pour documenter le site classé au patrimoine mondial de l'Unesco. La démarche a abouti début avril 2016. En seulement 4 jours, l'équipe a pu établir un relevé intégral du site, long de plusieurs kilomètres. "Notre technique de documentation se déroule en deux phases", précise Yves Ubelmann. La première consiste à l'acquisition, par un drone, de milliers d'images sous tous les angles du site. "Le drone nous permet d'accéder à des endroits non sécurisé, où peuvent se trouver des mines par exemple", explique l'architecte. La seconde phase est celle de la reconstruction 3D. Grâce à un algorithme, il est ensuite possible d'obtenir la forme et la couleur de l'objet. L'association des deux techniques (photogrammétrie et drone) "permet des relevés rapides et précis ; et donne des résultats utiles pour la conservation des données", se félicite le co-fondateur d'Iconem, passionné par la conservation du patrimoine.
Si cette opération a été possible sur le site de Palmyre, c'est notamment grâce à une levée de fonds de l'entreprise l'année dernière. En effet, une partie de ces fonds est réservé pour les "sites en danger", souligne Yves Ubelmann. Et d'ajouter : "Nous avions établi une liste rouge de sites en danger et beaucoup se trouvaient en Syrie". "Ces pays n'ont pas la possibilité, aujourd'hui, d'établir des documentations, "nous voulions les aider à sauver le patrimoine mondial". "Pour les sites menacés de disparition, notre technologie garantit, quoi qu'il advienne, la préservation de la connaissance archéologique. En scannant aujourd'hui des sites appelés à disparaître demain, nous œuvrons à la préservation d'un bien commun et assurons sa transmission aux générations futures", conclut l'entreprise.
Robert Amy laisse 40 ans de travail minutieux sur le temple de Palmyre en Syrie
L'architecte français Robert Amy a lui aussi, avec les moyens de l'époque, effectuer un travail de recensement incroyable. Pendant 40 ans, il a dessiné le temple de Bel avec "une précision absolue", a expliqué son fils Bernard à Europe 1. "Vu la minutie avec laquelle mon père a fait le relevé du temple de Bel à Palmyre, chaque moulure, chaque linteau, chaque fissure de chaque pierre... Avec ça, mon père disait : "on peut reconstruire le temple de Bel si on le détruit", a t-il assuré. Après ses observations sur place, Robert Amy a effectué la suite de son travail dans son bureau d'Aix-en-Provence. "Il a rassemblé tout ça, ensuite il a pu faire tous ces dessins. On peut essayer, si on retrouve les pierres, de refaire exactement le pavement qui est représenté sur ce dessin. On peut aussi imaginer que s'il manque des pierres on peut en retailler", espère son fils. Le directeur du musée des antiquités de Damas, qui a l'ouvrage en sa possession, a dit espérer s'en servir pour la restauration du temple détruit