La décision est tombée. La cour d'appel de Lyon a reconnu mardi la société de travaux publics Eurovia (groupe Vinci) coupable de "faute inexcusable" après la mort d'un ouvrier du bitume, en 2008, d'un cancer de la peau. L'entreprise indique vouloir "étudier un éventuel pourvoi en cassation".
C'est une première en France ! La cour d'appel de Lyon a reconnu mardi la société de travaux publics Eurovia (groupe Vinci) coupable de "faute inexcusable" après la mort d'un ouvrier du bitume, en 2008, d'un cancer de la peau.
Eurovia est condamnée à verser environ 200.000 euros de dommages et intérêts à la famille de la victime. "La maladie professionnelle liée au cancer du bitume est ainsi reconnue", a déclaré l'avocat de la famille Me Rinck, pour qui "ce procès exemplaire est de nature à mettre un terme à un scandale sanitaire". Selon lui, la cour dans son arrêt "dit que c'est exclusivement parce que Jose-Francisco Serrano Andrade était en contact avec le bitume" et que ce sont "les fumées dégagées par le bitume qui ont causé son cancer".
Du côté d'Eurovia, la cour d'appel "parle très précisément et exclusivement des rayons UV du soleil". L'avocat de la défense Me Franck Dremaux indique que "c'est la première fois en France qu'un tel risque est pointé à titre professionnel et constitutif d'une faute inexcusable". Quid de la suite ? L'avocat a indiqué que tout cela méritait "une étude attentive en vue d'un éventuel pourvoi en cassation".
Une procédure entamée il y a deux ans
En mai 2010, pour la première fois en France, un tribunal des affaires de sécurité sociale faisait le lien entre le cancer de la peau développé par un ouvrier et les fumées toxiques du bitume. Une décision qui soulignait la "faute inexcusable" de l'employeur, Eurovia, qui aurait manqué à son obligation de sécurité et de résultat vis-à-vis de Jose-Francisco Serrano Andrade, décédé en 2008. La sécurité sociale avait reconnu le cancer du salarié comme une maladie professionnelle. Un an plus tard, en mai 2011, la cour d'appel de Lyon a examiné le dossier à la lumière d'un rapport d'experts, confié au Comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles de Dijon (CRRMP). Dans un rapport du mois de novembre, le comité établit lui aussi le caractère professionnel de la maladie de l'ancien ouvrier, décédé à l'âge de 56 ans, confirmant donc la première expertise. Le document précise : "L'intéressé a été exposé de façon habituelle aux UV générés par le rayonnement solaire, du fait de ses activités en extérieur ", et "aux facteurs de risques" que constituent "les goudrons issus de produits houillés" ou "les huiles minérales servant d'agent fluxant des bitumes". Une thèse que réfute Eurovia, pour qui M. Serrano n'a jamais été exposé aux goudrons. "Le seul produit qu'il utilisait est une émulsion de bitume, contenant 40 % d'eau et qui n'est pas chauffée à plus de 70°", expliquait Maître Dana, défenseur du groupe, au mois de septembre dernier.