Les incitations de l'Etat français à l'investissement locatif sont hors-la-loi selon la Commission européenne, qui après avoir mis en garde Paris sur quatre anciens amortissements, pourrait à présent s'en prendre à l'amendement Scellier, l'une des mesures phares du gouvernement en matière de logement.

La Commission européenne aura-t-elle raison du dispositif Scellier ? Il y a quelques semaines, elle épinglait plusieurs dispositifs fiscaux encourageant l'investissement locatif, au titre que ceux-ci violaient la règlementation européenne. En cause, les amortissements dits Périssol, Besson, de Robien et Borloo neuf, permettant aux personnes faisant l'acquisition d'un logement neuf en vue de le louer d'en déduire une partie de leurs revenus fonciers. Pour Bruxelles, ces dispositifs sont «incompatibles avec la libre circulation des capitaux, principe fondamental du marché unique de l'Union européenne». En somme, ils sont contraires aux règles en vigueur dans l'UE, puisqu'ils permettent à un Français d'en bénéficier pour un achat en France, mais pas dans un autre Etat de l'UE.

 

Mais en réalité, on ne peut plus à ce jour enclencher ces dispositifs, puisqu'ils ont été remplacés par l'amendement Scellier dans la loi de Finances rectificative de 2008, pour donner un coup de pouce à l'investissement locatif alors plombé par la crise. Etrangement, ce dispositif n'avait pas été inclus dans l'avis de l'UE adressé en février à la France. Cependant, dans un entretien avec Les Echos paru lundi, le commissaire européen à la fiscalité, Algirdas Semeta, indiquait qu'il n'excluait pas «d'ouvrir une procédure» à l'encontre du dispositif Scellier. «Ce n'est pas à nous de dire [à la France] quels outils elle doit utiliser, mais à elle de voir comment elle doit les modifier pour tenir compte de nos remarques», expliquait-il aux Echos.

 

Pour l'instant, au secrétariat du Logement, on prépare seulement une réponse à l'avis effectivement adressé le 16 fevrier «dans le délai imparti», c'est-à-dire deux mois. Il s'agira d'ailleurs d'une réponse de l'Etat, puisque la question concerne plusieurs ministères, notamment celui des finances. Au secrétariat du logement, on souligne également que «le logement ne dépend pas en principe de la compétence de l'Union européenne, mais de celle des Etats». Reste donc à trancher qui, de la libre circulation des capitaux dans l'UE ou de la politique du logement de la France, aura le dernier mot.

 

L'amendement Scellier
Mis en place lors de la loi de finances de 2009 le dispositif Scellier est un amendement introduit dans la loi de Finances rectificative de 2008. Il permet une réduction d'impôt équivalente à 25 % du montant du prix du bien immobilier, avec un plafonnement à 300.000 euros et sous réserve d'un engagement de location de neuf ans. L'objet de cet amendement, voté en pleine crise immobilière et dans un contexte de manque de logement, était d'encourager les investisseurs pour démultiplier l'offre à la location. D'après la Fédération des promoteurs immobiliers, en 2010, 63% des ventes de nouveaux logements ont été portées par ce dispositif.

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