Un procès-verbal émanant de l'Autorité de sûreté nucléaire dénonce « une démarche intentionnelle » de non-déclaration d'accidents du travail sur le chantier de l'EPR de Flamanville, notamment de la part du responsable du génie civil, Bouygues. Ce dernier conteste les conclusions de l'ASN et indique que ce PV ne lui a pas été transmis. Détails.
L'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) a jeté un pavé dans la mare du nucléaire. Le procès-verbal (PV), reproduit en fac-similé dans le quotidien L'Humanité de vendredi, met en cause la responsabilité des employeurs du plus grand chantier d'EPR au monde, dont Bouygues qui pilote le génie civil et Elco Construct. « Dans plusieurs cas (au moins 11 exemples pour le groupe Bouygues et 8 pour Elco), ces employeurs étaient informés de l'accident. Ceux-ci avaient par ailleurs connaissance de l'obligation réglementaire de déclarer tout accident du travail », note l'ASN. Le gendarme du nucléaire a ainsi recensé 112 accidents du travail survenus en 2010, dont 38 accidents « à déclarer n'ayant pas fait l'objet d'une déclaration ».
Le Procureur de la république de Cherboug, qui a confirmé l'existence de ce PV, a affirmé avoir été saisi « il y a quelques jours » par l'ASN de ce problème de sous-déclaration des accidents du travail sur l'EPR. « Une enquête est en cours », a-t-il ajouté.
Le Procureur de la république de Cherboug, qui a confirmé l'existence de ce PV, a affirmé avoir été saisi « il y a quelques jours » par l'ASN de ce problème de sous-déclaration des accidents du travail sur l'EPR. « Une enquête est en cours », a-t-il ajouté.
Bouygues relance le fait d'une initiative personnelle
Pour sa part, Bouygues a publié une déclaration vendredi après-midi, indiquant contester les conclusions du rapport de l'ASN. Déjà, en avril dernier - alors que l'ASN venait de lancer une enquête sur une sous-déclaration des accidents du travail - le groupe de BTP s'était défendu en affirmant que les non-déclarations d'accident « n'étaient pas le fait de l'entreprise, mais relevaient d'initiatives personnelles », rappelle l'AFP. Cette fois encore, Bouygues réitère : « Il est apparu que, à l'insu des entreprises membres du GIE en charge du génie civil, certaines fiches médicales d'intervention n'ont pas été établies correctement par le personnel de l'infirmerie interentreprises. Les éventuelles absences de déclaration qui sont évoquées ne peuvent être que la conséquence d'initiatives malencontreuses du personnel de l'infirmerie ». L'entreprise récuse donc toute démarche intentionnelle de non-déclaration des accidents et toute initiative visant à éluder l'information de l'inspection du travail ou à détourner sa surveillance, comme le dénonce l'ASN dans son rapport. Rapport que Bouygues constate ne jamais avoir reçu. Pour sa défense, le groupe rappelle qu'il « n'a aucun intérêt à masquer ou minimiser les accidents du travail », qui constituent autant d'informations « au processus d'amélioration des actions de prévention ».
Les peines encourues sont 42 amendes de 4e classe soit 31.500 € et un an d'emprisonnement et 3.750 € d'amende pour le délit d'obstacle aux missions de l'inspecteur du travail.
Le réacteur nucléaire de type EPR de Flamanville est l'un des tout premiers en construction au monde, et représente en cela une vitrine exceptionnelle pour la France, qui compte bien exporter cette technologie. Mais le chantier accuse d'ores et déjà plus de deux ans de retard.