Les conventions collectives du BTP accordent des avantages différents aux salariés appartenant à des catégories professionnelles distinctes (ouvrier, ETAM ou cadre). Par exemple en matière de préavis ou d'indemnité de licenciement. Mais n'y a-t-il pas là un risque d'inégalité de traitement ? Attention, la Cour de cassation vient de modifier sa position sur le sujet dans un arrêt très important.
Avantages catégoriels : un risque de discrimination
On parle d'avantage catégoriel lorsqu'un salarié bénéficie, en raison de sa catégorie professionnelle (ouvrier, cadre, etc.), d'avantages supérieurs à ceux des autres salariés relevant de la même convention collective ou accord collectif.
Illustration : Dans les conventions collectives du Bâtiment, l'indemnité de licenciement n'est pas la même pour les ouvriers, les ETAM et les cadres.
Par exemple entre 2 et 5 ans d'ancienneté :
- les ouvriers bénéficient d'une indemnité fixée à 1/10 de mois de salaire brut par année d'ancienneté ;
- les ETAM bénéficient d'une indemnité fixée à 2,5/10 de mois de salaire brut par année d'ancienneté ;
- les cadres bénéficient d'une indemnité fixée à 3/10 de mois de salaire brut par année d'ancienneté.
De telles différences sont régulièrement pointées du doigt et la rupture de l'égalité de traitement invoquée.
D'autant que jusqu'à présent la Cour de cassation elle-même jugeait que l'égalité de traitement s'opposait à ce que des différences soient opérées entre des catégories professionnelles. Sauf à pouvoir prouver qu'elles reposent sur des raisons objectives liées à la spécificité de la situation des salariés relevant de la catégorie (par exemple aux conditions d'exercice des fonctions, à l'évolution de carrière, etc.).
Mais aujourd'hui une nouvelle position vient d'être adoptée par la Haute Cour.
Avantages catégoriels : leur justification est présumée
La Cour de cassation a rendu une décision de principe concernant la branche SYNTEC-CINOV. En l'espèce, un syndicat avait invoqué une rupture de l'égalité de traitement entre cadres et ETAM relevant de la convention SYNTEC-CINOV et avait demandé l'ouverture d'une renégociation. Plusieurs avantages attribués aux cadres étaient mis en cause (durée de préavis de licenciement plus long, meilleure indemnité de licenciement, primes supplémentaires, etc.).Contrairement à ce que l'on pouvait penser, la Cour de cassation n'a pas demandé à ce que des raisons objectives soient invoquées pour justifier ces différences. Elle a, au contraire, jugé que les différences de traitement entre catégories professionnelles instituées par voie de conventions ou accords collectifs sont présumées justifiées. Une position qu'elle explique par le fait que de tels conventions ou accords sont négociés et signés par des organisations syndicales représentatives habilitées par le vote des salariés.
La charge de la preuve est ainsi désormais inversée : c'est à celui qui invoque la rupture de l'égalité de traitement (en l'espèce le syndicat) de démontrer qu'elles sont étrangères à toute considération professionnelle.
Une décision qui devrait soulager de nombreux employeurs…
Pour connaître toutes les spécificités des conventions collectives du BTP, les Editions Tissot vous conseillent leur documentation « Gestion pratique du personnel et des rémunérations du BTP ».