Le Syndicat des professionnels de l'énergie solaire a récemment soumis au Président de la République un plan "Autoconsommation solaire solidaire" afin d'équiper des foyers précaires d'installations de toiture. Mais il s'inquiète d'un amendement au projet de loi visant à modifier certaines "dispositions relatives à l'énergie". Explications.
Au début du mois de septembre 2017, Enerplan, le syndicat des professionnels de l'énergie solaire, a formulé une proposition à l'exécutif intitulée "Plan autoconsommation solaire solidaire". Il consisterait à équiper, d'ici à 2022, un million de logements HLM et 500.000 logements en copropriétés ou maisons individuelles aux occupants précarisés, de panneaux solaires afin de fournir des kWh. De quoi couvrir entre 10 et 20 % des besoins des ménages grâce à des installations de 300-500 W par logement, chiffre qui pourrait être porté à 40 % grâce à une gestion active de l'énergie (report des consommations au moment de la production notamment). Une initiative qui nécessiterait environ 1 milliard d'euros d'investissement qui serait versé aux offices HLM, aux copropriétés et à des tiers-investisseurs participants au plan. Par effet de massification de la demande, le coût de revient du kWh chuterait ainsi de 10-12 centimes d'euro à seulement 3-5 centimes, bien en dessous du tarif régulé de vente d'électricité. Un tel plan existe déjà outre-Manche, où 800.000 foyers britanniques à faibles revenus seront gratuitement équipés de panneaux solaires dans les 5 ans.
Mais les professionnels français s'alarment aujourd'hui pour l'avenir de l'autoconsommation dans l'Hexagone, car les députés ont adopté en commission un amendement au projet de loi "mettant fin à la recherche ainsi qu'à l'exploitation des hydrocarbures conventionnels et non conventionnels et portant diverses dispositions relatives à l'énergie et à l'environnement". Enerplan précise que cet amendement, n° CE45, a été présenté sans concertation préalable par Célia de Lavergne, rapporteure pour avis au nom de la commission des affaires économiques de l'Assemblée. Il aurait été rédigé pour répondre à un arrêt de la cour d'appel de Paris du 12 janvier 2017 qui estimait que la création de réseaux fermés d'électricité pour y partager un courant produit localement "mettait illégalement en cause le monopole du gestionnaire du réseau public de distribution".
L'autoconsommation oui, mais pour qui ?
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Le texte propose de créer le statut de "réseaux intérieurs des bâtiments" afin d'autoriser l'autoconsommation avec un point unique de livraison "dans les bâtiments à usage tertiaire ou accueillant un service public, appartenant à un propriétaire unique". Une disposition qui permettra donc l'autoconsommation collective dans les immeubles de bureaux. Mais le libellé de l'amendement pourrait également signifier que les autres types de bâtiments, dont ceux d'habitation, ne pourraient pas profiter de ces réseaux intérieurs d'électricité. Enerplan considère également que le texte allait compliquer administrativement les choses, notamment lorsqu'un propriétaire vendrait une partie de son bien immobilier. Le syndicat note : "Il existe donc un risque que cet amendement constitue, dans le même temps, une avancée et un recul". Afin de lever le doute, il propose que le texte soit conservé mais précisé, afin de s'assurer qu'il favorisera bien l'autoconsommation en France.
Daniel Bour, le président d'Enerplan, déclarait, lors de l'annonce du plan "Autoconsommation solaire solidaire" : "Aujourd'hui modeste, 14.000 producteurs-consommateurs selon les chiffres d'Enedis, l'autoconsommation à vocation à prendre de l'ampleur, si on favorise les conditions de son émergence. EDF Energies Nouvelles estimait, il y a quelques jours, à 600.000 le nombre d'installations en autoconsommation dans les 5 prochaines années, et à 4 millions dans les 10 ans". Son syndicat entend mettre l'accent sur deux aspects : l'autoconsommation collective, pour partager la production d'électricité solaire entre voisins, et les systèmes de stockage stationnaires ou mobiles.