CRISE. D'après les assureurs français, réunis au sein de la Fédération française de l'assurance, ce sont 100.000 contrats qui sont impactés par la crise de l'assurance-construction. Le problème étant qu'un grand nombre des acteurs concernés ne sont toujours pas conscient du fait qu'ils ne sont plus couverts. Explications.
Plusieurs chiffres circulent sur le nombre de contrats impactés par la crise que traverse le secteur de l'assurance-construction en libre prestation de services (LPS). "Nous ne disposons pas d'un décompte exact des sociétés et personnes touchées, car il est difficile de récupérer les fichiers des acteurs qui sont aujourd'hui en liquidation", nous explique Stéphane Pénet, directeur des assurances de dommages et de responsabilité de la Fédération française de l'assurance (FFA). "Nous estimons à une centaine de milliers le nombre de contrats devenus 'orphelins', dont une partie sans que les personnes assurées en soient conscientes." Un chiffre qui est également celui avancé par l'Autorité de contrôle et de régulation (ACPR), le gendarme français des assurances.
"Chacun a réalisé qu'il y avait un 'trou dans la raquette'"
Que doivent faire les assurés impactés ? Bien entendu, se rapprocher d'un autre assureur pour retrouver une couverture. "Les assureurs de la FFA examineront les dossiers de tous les assurés concernés. Plus spécifiquement, pour les entreprises, nous sommes prêts à les assurer pour de futurs chantiers et à reprendre leur passé inconnu moyennant le paiement d'une prime", explique Stéphane Pénet. L'organisation se félicite en tout cas du fait qu'une prise de conscience ait eu lieu sur ce sujet qui laisse entreprises, maîtres d'ouvrage, clients, sur le carreau. "Chacun a réalisé qu'il y avait un 'trou dans la raquette'" - même si la FFA soutient toujours, en tant que tel, le régime de la LPS.
Aujourd'hui, le dernier acteur majeur et connu intervenant encore dans la construction en LPS est Millenium, une "société qui fait l'objet de beaucoup d'attention", au vu de l'actualité de ces derniers mois.
Comment repérer à l'avance des acteurs moins crédibles ?
Quelles solutions proposent les assureurs pour sortir de l'ornière et éviter qu'une telle situation (des faillites d'assureurs en série) ne se reproduise ? "La LPS nécessite un bon niveau de communication entre les différents régulateurs", explique Stéphane Pénet. "Cela évolue dans le bon sens, même si la réalité des contrôles reste à faire. Pour les risques longs, il faut que toutes les autorités connaissent le système spécifique du marché sur lequel interviennent les assureurs qu'elles ont sous surveillance." Comme signal d'alerte possible, la FFA évoque l'idée de repérer les assureurs qui interviendraient uniquement à l'étranger, sans disposer d'un marché domestique. De quoi mettre la puce à l'oreille.
"Ces acteurs en LPS sont venus casser les prix et ont obligé les assureurs 'historiques' à rogner leurs marges"
Enfin, l'une des thèses souvent avancées, notamment par les artisans du bâtiment, au sujet des raisons de cette crise, est le rôle supposé des assureurs 'historiques'. Ils seraient, à les en croire, trop chers, et refuseraient d'assurer de nombreuses TPE, les renvoyant parfois expressément vers des solutions à bas coût en LPS. "Ce discours est navrant", réagit Stéphane Pénet. "On vient pointer du doigt des assureurs qui gèrent avec rigueur leurs affaires et respectent les obligations auxquelles ils sont soumis. Pourtant, ces acteurs en LPS sont venus casser les prix et ont obligé les assureurs 'historiques' à rogner leurs marges." Si le système français "Spinetta" est plus cher, c'est "lié au choix du législateur concernant le régime de responsabilité des constructeurs". Un régime auquel les professionnels de l'assurance restent attachés car "il protège la qualité de la construction et l'ensemble des acteurs".