ADAPTATION. Un nouveau document publié en octobre permet de mieux accompagner les acteurs de la construction en outre-mer et de favoriser des techniques et matériaux ancestraux. L'objectif : construire et rénover en s'appuyant sur les spécificités des territoires.

Il est publié. Après 15 mois de travail, les Assises de la construction durable en outre-mer, initiées dans le cadre du programme Ombree (programme inter outre-mer pour des bâtiments résilients et économes en énergie) et organisées par l'Agence Qualité Construction (AQC), viennent de pondre un livret blanc.

 

Présenté lors du salon de la construction Batimat, à Paris, ce mardi 1er octobre 2024 et remis à Micheline Jacques, sénatrice de Saint-Barthélemy et présidente de la Délégation sénatoriale aux outre-mer, le document aborde la formalisation de normes locales, le soutien à l'innovation et la sensibilisation et l'accompagnement des professionnels.

 

But des Assises

 

Les Assises, initiées en 2023, réunissent 11 territoires ultramarins et plus de 300 professionnels. "Elles ont été créées en réponse aux préconisations du rapport sénatorial de 2017, qui appelait à la création de référentiels adaptés aux spécificités ultramarines en collaboration avec les instances nationales", expliquent les porteurs des Assises.

 

"Chaque territoire ultramarin possède un savoir-faire local en matière de construction, adapté à son climat et à ses ressources, mais souvent ignoré par les référentiels actuels, conçus pour l'Hexagone." L'objectif ici est d'ajuster les normes et labels pour s'aligner aux usages et à l'architecture locale mais aussi aux spécificités climatiques et géographiques.

 

Quatre grandes idées

 

La consultation a permis de structurer ce document autour de quatre axes de travail. Le livret, consultable gratuitement en ligne, préconise la création d'une instance de coordination ultramarine, afin de produire des actions concrètes, réduire les coûts de la construction, renforcer la durabilité des bâtiments ultramarins et valoriser les savoir-faire locaux.

 

"La construction durable ultra-marine est à la croisée des territoires. La mobilisation de 300 acteurs a permis de produire une réflexion riche. Aujourd'hui, la création d'une fédération est une nécessité", déclare Alçai Mourouvaye, dirigeant de Sinarji (La Réunion), à Batimat.

 

Vers plus d'innovation

 

Pour les porteurs de ces Assises, il est urgent de faire émerger des solutions "innovantes" face aux effets du dérèglement climatique et adaptées aux spécificités de leurs territoires. Cela passe, notamment, par l'adoption de techniques constructives régionales.

 

Les professionnels ultramarins de la construction cherchent à mutualiser leurs expertises et à partager leurs expériences. Ce travail collaboratif les mène à fonder une organisation inter-outre-mer afin de structurer une filière ultramarine de la construction durable.

 

Des référentiels adaptés

 

L'une des propositions majeures est l'écriture de référentiels spécifiques à ces territoires, et le soutien à l'innovation en promouvant une approche régionale. "La diffusion et le partage des connaissances doivent être un des maillons de la réussite de ce projet pour avoir une construction durable. Cela concerne tous les acteurs du secteur", affirme Paul Quistin, responsable technique du bureau d'études Anco (Guadeloupe). Ce livret aidera, in fine, tous les professionnels "à monter en compétences et à construire résilient".

 

De son côté, le directeur de la Brique Guyane, Stéphane Lambert, se réjouit de cette initiative qui crée "un réseau intercontinental permettant d'échanger et de mieux fonctionner". Melvyn Gorra, coordinateur de l'association Art Terre Mayotte qui œuvre à structurer la filière terre sur l'île, rappelle que l'un des buts du livret blanc est de faciliter l'expérimentation. "Les maîtrises d'ouvrage ont des difficultés à lancer des projets innovants. Nous voulons recenser les pratiques et chantiers qui font usage d'expérimentation afin qu'elles puissent les utiliser dans leur cahier des charges."

 

L'Hexagone aussi concerné

 

Des solutions déployées loin d'Europe peuvent aussi s'appliquer en Métropole, croit Yannick Bruneau, président de Bruneau & Guezzi Architectes (Saint Barthélémy). L'homme originaire de Corse a proposé à des élus de communes de l'île de Beauté, gravement touchée par des épisodes de sécheresse, d'installer des citernes de récupération des eaux de pluie, un dispositif "obligatoire à Saint-Barthélemy. C'est une solution prête et applicable."

 

La suite des Assises est le lancement d'un forum de la construction durable en outre-mer en 2025. Il servira de "lieu d'échange et de production, et permettra de formaliser des référentiels, accompagner les acteurs, soutenir l'innovation et sensibiliser et partager les connaissances", annonce Alçai Mourouvaye.

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