Si les nouvelles technologies numériques occupent aujourd'hui une importante place médiatique dans le secteur de la construction, tous les professionnels n'y accordent pas la même attention. A l'occasion des prochaines Journées de la construction, les présidents de différentes Unions nationales d'artisans livrent leur sentiment sur la question.
Le numérique et les technologies de l'information sont aujourd'hui partout, dans la poche de chaque utilisateur de smartphone, dans la box de chaque internaute et désormais dans les compteurs électriques ou dans l'électroménager. L'appropriation de ces solutions dites "intelligentes" par les artisans est inéluctable. Christophe Bellanger, le président de l'UNA Equipement électrique et électro-domotique (3E) à la Capeb, résume : "La révolution numérique est un thème transversal. Comment va-t-on réagir dans nos différents métiers ? Comment la transformer en opportunité ?". Le professionnel, qui dirige une entreprise artisanale d'électricité générale employant une quinzaine de personnes, évoque l'arrivée de matériels connectés sur le marché qui offrent de nouvelles possibilités en termes de pilotage, d'optimisation des consommations ou de facilité d'utilisation et de maintenance.
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Les solutions communicantes se répandent
La généralisation de ces solutions communicantes fait peu à peu prendre corps au concept de "Smart Home", c'est-à-dire de logement intelligent, capable de s'adapter à ses occupants et à leurs habitudes. Une question qui se pose à cause de l'évolution des modes de vie et de consommation : accompagnement du vieillissement des populations avec la question du maintien à domicile, développement des installations énergétiques décentralisées et de l'autoconsommation, déploiement des véhicules électriques… "Là aussi, il faut trouver la place que peuvent occuper les artisans. Comment vendre et installer ces équipements ? Comment appréhender sur le terrain ce marché-là ?", s'interroge le responsable de l'UNA 3E.
Dans une démarche prospective, il envisage que les artisans proposent des contrats d'entretien, afin de rester chez les clients et d'éviter de perdre des parts de marché au profit de grosses entités. Un axe qui pourrait constituer une perspective de développement pour l'activité des entreprises artisanales. "Il faut davantage aller vers du commercial, être à la page des toutes dernières technologies. Et pour cela, il faut se former et être à l'écoute des clients pour proposer des produits qui leurs rendent service en termes de confort, d'économies ou de télémaintenance", déclare-t-il. Même constat du côté de l'UNA Couverture-plomberie-chauffage (CPC). Bruno Gal, son président, explique : "Il faut se méfier de géants comme Engie, qui vendent de moins en moins de gaz et qui se rabattent sur les services. A nous de rester vigilants au niveau de la Capeb, afin de maintenir l'emploi et les compétences dans nos entreprises". Celui qui est aussi chauffagiste observe l'émergence des solutions innovantes et connectées dans le secteur plomberie-chauffage, avec une multiplication des dispositifs de pilotage. "Encore faut-il qu'ils communiquent entre eux et soient compatibles", rappelle-t-il.
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Les artisans en sont aux balbutiements du BIM
Concernant la maquette numérique, c'est David Morales, président de l'UNA Métiers et techniques du plâtre et de l'isolation et membre du comité de pilotage du Plan de Transition Numérique dans le Bâtiment, qui s'exprime : "Le BIM (Building Information Modeling) doit être l'affaire de toute la filière du bâtiment, et ne doit pas être cantonnée aux seuls gros chantiers. Tout le monde cite l'exemple de l'hôpital d'Ajaccio mais combien d'artisans sont impliqués ?". Le spécialiste de la question numérique à la Capeb détaille : "Forcément, le BIM nécessitera un investissement de la part des artisans, tout comme l'arrivée des premiers ordinateurs personnels voilà 25 ans. Mais dans quelques temps on n'y pensera plus". Le professionnel, qui dirige une entreprise en plâtrerie-isolation de 10 personnes, estime que les solutions informatiques vont rapidement évoluer pour se démocratiser. "Les logiciels vont être de moins en moins chers. Et ceux qui vont trop vite risquent d'avoir des machines qui ne seront plus compatibles et ne serviront donc à rien. Il ne faut pas se presser : nous allons y aller, doucement. Je ne suis pas inquiet", explique-t-il. Quant aux bénéfices attendus, notamment en termes d'économies réalisées sur le coût de la construction, il déclare : "Ces économies ne seront pas réalisées par le second œuvre, c'est sûr. Elles le seront sur toute la durée de vie du bâtiment. Mais le numérique est une évolution importante".