AIDES A L'EMBAUCHE. L'Union des entreprises de proximité (U2P) s'alarme d'une diminution de l'aide à l'embauche d'apprentis qui freinerait le recrutement de jeunes et casserait la dynamique de formation en alternance.

"Il semblerait que le coup de rabot sur la prime d'apprentissage soit toujours dans les tuyaux". Michel Picon, président de l'U2P (entreprises de proximité) a échangé avec la ministre du Travail Astrid Panosyan-Bouvet mercredi 9 octobre, à la veille de la présentation du projet de budget 2025 qui promet des coupes sévères dans les dépenses pour environ 40 milliards d'euros. Parmi les mesures envisagées, la diminution de l'aide à l'embauche d'apprentis.

 

Depuis le 1er janvier 2023, cette prime s'élève à 6.000 euros quel que soit le niveau de formation préparé et la taille de l'entreprise qui recrute. L'aide -qui s'applique uniquement sur la première année du contrat d'apprentissage- ne prendra sans doute pas fin au 31 décembre 2024 ; mais le gouvernement Barnier envisage sérieusement de raboter cet accompagnement financier en le ramenant à 4.500 euros. Le coût de l'apprentissage pour les finances publiques a plus que triplé entre 2018 et 2022 : la direction du budget l'évalue à près de 14 milliards par an et l'OFCE à près de 20 milliards. Le versement de la prime à l'embauche représenterait un tiers de ce coût soit 4 à 5 milliards d'euros par an.

 

Double peine pour les TPE

 

"Ne sacrifions pas l'apprentissage sur l'autel des économies budgétaires", a dénoncé l'U2P dès le 8 octobre. L'organisation professionnelle s'inquiète aussi d'une possible suppression des exonérations de charges sur le salaire des apprentis. Actuellement, l'exonération des cotisations salariales spécifique aux contrats d'apprentissage du secteur privé est limitée à 79 % du Smic. "On s'orienterait vers une double peine : moins d'aides et plus de charges", déplore l'U2P. Même constat à la CPME, qui redoute qu'embaucher un apprenti soit plus coûteux et que son salaire soit désormais assujetti à des charges sociales. "Lorsqu'on sait que 70% des apprentis sont dans les PME, on comprend, là encore, que la mesure impacterait avant tout les PME", fait valoir l'organisation professionnelle.

 

L'U2P plaide pour le maintien de la prime de 6.000 euros pour les entreprises de taille inférieure à 50 salariés voire les PME de moins de 250 salariés. Selon l'entité, il faut "revenir à la situation d'avant 2020 quand les entreprises de plus de 250 salariés étaient exclues du dispositif d'aide à l'apprentissage. Qui peut affirmer qu'une entreprise du CAC40 a autant besoin d'une aide à l'apprentissage que la TPE de moins de 10 salariés ?". D'après les chiffrages de l'organisation, ce recentrage de l'aide sur les petites et moyennes entreprises permettrait d'économiser plus d'un milliard d'euros.

 

Recentrer l'aide sur les niveaux de qualification du CAP au BTS ?

 

Une autre piste est dans les tuyaux : réserver les aides à l'embauche d'apprentis aux niveaux de qualification inférieurs à bac +3 (licence professionnelle, Bachelor universitaire de technologie…), allant donc du CAP au BTS inclus. Depuis 2018, la réforme de l'apprentissage (loi sur la liberté de choisir son avenir professionnel) a permis de quasiment quadrupler le nombre d'apprentis en France, passé de 270.000 à près d'un million. Fin juillet 2024, le ministère du Travail recensait ainsi 970.000 apprentis en France soit une hausse de +4,7% sur un an. Mais près de la moitié des apprentis préparent un diplôme de l'enseignement supérieur.

 

Dans son discours de politique générale, le Premier ministre avait indiqué vouloir "continuer de soutenir l'apprentissage, mais en évitant les effets d'aubaine". Si le coup de rabot sur les aides à l'apprentissage semble décidé, reste à savoir la forme qu'il prendra. Le projet de budget 2025 présenté en Conseil des ministres jeudi 10 octobre devrait permettre de savoir si l'aide à l'embauche sera recentrée sur les TPE et PME et si elle ne bénéficiera plus qu'à certains niveaux de qualification.

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