POLITIQUE. Alors que seulement 90.000 logements sociaux ont été construits en 2020, la ministre lance un "défi" aux bailleurs et aux élus et annonce des financements. CDC Habitat lance, de son côté, un appel à projets pour 30.000 logements dans les deux ans.
En fin d'année dernière, le bilan triennal de la loi SRU a été rendu public. Thierry Repentin, qui dirige la commission nationale du même nom, a remis fin janvier au gouvernement ses proposition pour l'avenir de cette loi. Par ailleurs, les mauvais chiffres de la construction de logements sociaux occupent l'actualité. De la ministre du logement au Conseil de Paris, en passant par Yannick Jadot, la question du logement social est revenue, en ce début d'année, au cœur des discussions politiques, et des postures.
Emmanuelle Wargon, la ministre chargée du logement, s'était félicitée, en janvier, de la "fermeté" dont avaient fait preuve les préfets dans l'application de la loi, notamment dans le travail avec les communes ne respectant pas les obligations en matière de logement social dictées par la loi SRU. Le 2 février, elle a lancé sur BFMTV un "appel" à la construction de 250.000 logements sociaux en deux ans. "Je lance un défi à tous sur la construction du logement social", a-t-elle indiqué, souhaitant "que le plan de relance 2021-2022 soit l'occasion de rattraper notre retard". Elle a rappelé que 90.000 logements sociaux avaient été construits en 2020, soit "moins que nos objectifs".
Ce "défi" sera financé "avec de l'argent de l'Etat. Avec l'accord des partenaires sociaux nous allons mettre ensemble 1,5 milliard d'euros avec Action logement qui est l'organisme des partenaires sociaux sur le logement, et avec la Caisse de dépôt", a-t-elle précisé. Elle a également lancé un appel "aux organismes HLM pour qu'ils se remettent à construire" et aux élus locaux pour qu'ils délivrent des permis de construire.
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Désaccords au sein de la majorité parisienne
Au Conseil de Paris, le même jour, les désaccords entre communistes et écologistes sur le logement social se sont invités lors des débats, où les deux alliés ont défendu leur ligne tout en prenant soin d'afficher un front uni face à l'opposition. L'annulation en janvier par le tribunal administratif d'un projet de logements sociaux dans le 16e arrondissement avait donné lieu à une vive passe d'armes sur le réseau social entre EELV et l'adjoint à la maire de Paris Ian Brossat (PCF). Le groupe EELV du 16e s'était félicité de l'abandon de ce projet qui ne respectait pas à ses yeux les règles d'urbanisme, "notamment la protection des espaces verts", s'attirant en retour les foudres de l'élu communiste ironisant sur le "programme" de ses alliés Verts.
Ce projet, a rappelé Ian Brossat mardi au premier jour du Conseil de Paris, visait à créer 80 logements sociaux dans un arrondissement qui n'en compte que 7%. Prenant acte de la décision judiciaire, l'élu a toutefois indiqué avoir demandé aux équipes de Paris Habitat, le bailleur social, de travailler à un nouveau projet, qui permette "de faire du logement social mais en ayant une meilleure insertion urbaine". Côté écologistes, la présidente du groupe EELV Fatoumata Koné a maintenu la position de son parti concernant le projet, épinglant ses modalités et appelant à ne pas "opposer les impératifs sociaux et écologiques".
Le groupe se range aux côtés de ses alliés mais restera "vigilant", a-t-elle ajouté, prenant soin de distinguer les réserves d'EELV et l'opposition de droite, qui "traduit simplement le rejet d'un projet de logement social". Le maire du 16e arrondissement Francis Szpiner (LR) a de son côté fustigé "un projet absurde architecturalement" et a appelé la majorité à sortir des "postures idéologiques". Au 11e janvier 2019, la mairie de Paris comptait 250.618 logements sociaux, soit 21,4%, selon l'atelier parisien d'urbanisme (Apur).
Yannick Jadot veut 30% de logements sociaux
Le probable candidat à la primaire EELV en vue de la présidentielle de 2022 Yannick Jadot appelle, le même jour, dans une tribune du Monde, à porter le seuil minimal de logements sociaux à 30% dans les villes où l'offre en matière d'habitat s'avère insuffisante. Alors que la loi SRU fixe l'objectif à 25%, "le gouvernement doit avoir le courage de porter l'objectif de la nouvelle SRU à 30% de logements sociaux dans les villes où la demande de logements ne trouve pas d'offre suffisante", estime l'eurodéputé. "C'est un impératif majeur de cohésion sociale", poursuit celui qui pour aider les communes à y parvenir, appelle notamment à augmenter "les aides à la réalisation de logement social" ou encore à revenir "sur les mesures de ponctions budgétaires sur les bailleurs sociaux." "Osons en faire une priorité et y mettre les moyens".
CDC Habitat répond à la ministre et lance un appel à projet pour 30.000 logements sociaux
CDC Habitat, premier bailleur de France en nombre de logements, s'engage, toujours le même jour, en réponse à l'appel d'Emmanuelle Wargon, à produire 42.000 logements locatifs sociaux sur 2021 et 2022, "soit une hausse de plus de 50% de sa production annuelle par rapport à 2020". La filiale de la Caisse des dépôts annonce pour cela un appel à projets visant la production de 30.000 logements locatifs sociaux. Une manière de répondre aux besoins tout en participant à la relance, comme le bailleur s'y était engagé dès le milieu de l'année dernière.
L'appel à projets concernera des acquisitions de logements en Vefa auprès des promoteurs immobiliers, de fonciers en Zac ou en diffus pour réaliser des opérations de construction neuve en maîtrise d'ouvrage directe ou des projets mixtes avec des promoteurs, de bâtiments existants pour réaliser des opérations de conventionnement et de rénovation énergétique d'habitat, ou encore des immeubles de bureaux à transformer en logements.