Avec le projet de Suitehotel, le groupe Accor tente de séduire une clientèle junior et urbaine. Pour la première fois, l'hôtelier tente d'implanter, en friche urbaine, un nouveau concept d'hôtel, entre Ibis (2 étoiles) et Sofitel (4 étoiles), sorte de lieu d'étape pour " adulescents". Quelque 70 établissements sont prévus d'ici 10 ans.

"Pour être caricatural, Suitehotel est l'hôtel pour la femme d'Hubert", explique Pascal Pingon, directeur général du développement et construction chez Accor. "Dans quelques années, une personne sur deux en voyage d'affaire sera une femme. Moderne, elle veut pouvoir être autonome : repasser son tailleur, faire du fitness et avoir son propre sèche-cheveux. Finir le temps de la gouvernante. Suitehotel lui propose tout cela. Quant à son mari, Hubert, nous l'avons imaginé, avec son téléphone portable d'une main, le joystick de l'autre tout en ayant un oeil rivé sur sa messagerie internet. C'est un homme soucieux de son indépendance, le terme "nomade" lui convient bien. Il a entre 35 et 45 ans et veut être tranquille : son lit, il s'en charge ; son repas, c'est snack devant la télé ou grand restaurant entre amis. En couple, Ils veulent pouvoir prendre une douche ou un bain, séparément ou ensemble. Ils veulent, sans avoir à ranger la chambre, recevoir des collègues ou des connaissances dans leurs chambres grâce à un aménagement amovibles (cloisons mobiles)."
En somme, ce nouveau client fait un peu référence au personnage de Tanguy Guetz du dernier film d'Etienne Chatiliez : " Si tu veux tu pourras rester à la maison toute ta vie ". Pour Hubert, comme pour Tanguy, Ibis est bien trop inconfortable et Sofitel, bien trop bourgeois.

"Des hôtels à vivre"

"Même qu'on se dit souvent / Qu'on aura une maison / Avec des tas de fenêtres / Avec presque pas de murs / Et qu'on vivra dedans / Et qui fera bon y être..." : citant volontiers "Ces gens-là" de Jacques Brel, Pascal Pingon fait reposer le concept de Suitehotel sur le luxe de l'espace et de la situation.
Situé en centre ville, l'hôtel possède un lobby transparent entre ville et jardin, espace de snacking, business corner, salle de Fitness, de repassage. La chambre est quand à elle modulable, spacieuse (25 m²), équipée en sanitaire symétrique (" nous avons banni l'éternel salle de bains handicapé "), en connectique et en électroménager (four à micro-ondes). Petit clin d'oeil, les chambres alternent entre droite et gauche permettant au gaucher de ne plus se couvrir de bleu. "Quand à la déco, nous ne re-fabriquons plus tout le mobilier. On utilise des produits du commerce. Beaucoup plus périssable, ils permettent un renouvellement possible en fonction des modes et du design du moment. Les objets sont considérés comme les anecdotes de l'environnement. Comme les draps ou la moquette, ils peuvent être changés régulièrement. Avant, il n'y avait aucun plaisir d'être à l'hôtel. Ici, nous espérons créer une convivialité proche de la maison."

Novotel façon 21ème siècle

Suitehotel a vu le jour en 1998 sur l'injonction de Paul Dubrule, co-fondateur d'Accor en 1967 : "je regrette que depuis 1992, avec le concept d'Etap'hotel, nous n'ayons rien lancé.". Propos très provocateur, puisque sur cette période, le périmètre de la société a presque doublé.
Mais, dans l'imaginaire du grand public, les deux dates marquantes resteront, la création de la chaîne hôtelière Novotel en 1967 et, en 1985, de Formule 1. "Suitehotel représente la version 21ème siècle de Novotel. A l'époque, Novotel se devait d'être au coeur des réseaux de communications. Aujourd'hui, avec le train et l'avion, les coeurs de ville sont réinvestis. Nous devions nous adapter. Pourtant nous avons gardé le même positionnement transversal : une prestation proche du 5 étoiles, des services types 2 étoiles pour un prix 3 étoiles, contrairement au Sofitel où le positionnement est de type horizontal (prestations, services et prix 4 étoiles). En fin de compte, nous gardons notre credo d'Accor : répondre industriellement à l'époque."

Lancé à Lille en 1999, berceau historique d'Accor, il existe aujourd'hui 5 établissements : trois en régions parisiennes (Montreuil, stade de France et Roissy) et un à Vienne en Autriche. D'emblé, la vocation de Suitehotel est d'être européen avec une couverture en France, Allemagne et Bénelux. Le prochain sera à Hambourg et un autre à Calais, sur la zone d'eurotunnel. Pour 2003, trois autres sont programmés : Vélizy, Rueil et Hanovre. "A la fin de l'année, nous aurons une capacité de 900 chambres, ajoute Pascal Pingon. D'ici à 10 ans, nous espérons une chaîne de 70 hôtels pour une production de 8 à 10 hôtels par an. Sachant qu'il faut quatre à cinq ans pour développer un site, nous comptons atteindre cette vitesse de croisière en 2004 suivant les opportunités foncières du moment. De toutes manières, il est sûre que la future clientèle de Suitehotel n'est pas encore arrivée à maturité. Elle a aujourd'hui entre 25 et 35 ans."

Emmanuel Vicarini

" Développement durable et tourisme durable "

Accor est le premier groupe hôtelier d'Europe. Présent dans 140 pays avec 147 000 collaborateurs, il représente aussi un groupe d'envergure mondial dans l'Hôtellerie et les Services. Avec plus de 3 700 hôtels, de l'économie au luxe, dans 90 pays, Accor propose des formules de séjours adaptées aux envies et aux budgets de chacun de ses clients. Les activités de voyages, de restaurations et les casinos viennent compléter cette offre unique dans l'univers du loisir et du tourisme. Installé à une telle position, Accor ne pouvait ignorer les problèmes d'environnement. Pour eux, le développement durable est la convergence d'un engagement pour le tourisme durable doublé d'une campagne de communication. En témoigne " le petit million d'euros ", (dixit Patrick Bonnetain, directeur technique d'Accor) affecté à cette direction comparé au 7 290 millions d'euros de CA.

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