La commission d'enquête administrative sur la catastrophe de Roissy présidée par Jean Berthier a rendu son premier rapport d’étape. Une perforation de la voûte en béton par des pièces de soutien métalliques serait la cause la plus probable de l’effondrement du terminal 2 E.

C’est sur la base d’un mois d’enquête approfondie, mais sans avoir été autorisé à se rendre sur les lieux de la catastrophe pour des raisons de sécurité et pour ne pas gêner l’enquête judiciaire, que la commission d'enquête administrative a rendu ses premières conclusions.
La surprise est de taille car la commission, conduite le président du Conseil national des ingénieurs et scientifiques de France, a d’emblée écartée deux hypothèses souvent évoquées pour expliquer la catastrophe : un tassement des fondations en raison d’une présence de gypse à quelques centaines de mètres au sud-ouest de la jetée et surtout celle de fragilités au niveau des piles soutenant l’ensemble de l’édifice.

"Le tassement des fondations paraît très peu probable, malgré les inquiétudes initiales que pouvait susciter la présence de gypse à quelques centaines de mètres au sud-ouest de la jetée : aucun des très nombreux sondages réalisés ne l'a mis en évidence, et les fondations ont paru d'autre part normalement dimensionnées compte tenu de la nature des terrains. Mais il reste à faire des mesures précises du niveau des piles pour écarter définitivement cette hypothèse" explique Jean Berthier.
Sur les piles elles mêmes, les observations sur site et les photographies montrent qu'il n'y a pas eu rupture des têtes par cisaillement, les épaufrures du béton résultant sans doute de la chute de la poutre sablière. "Bien que le chantier ait connu des incidents lors de la construction des piles (fissurations, et rotations excessives des appareils d'appui), on peut considérer que ces incidents, réglés par les corrections apportées pendant la suite du chantier, ne sont pas à l'origine de l'accident" affirme la commission d’enquête. Par ailleurs, l'observation des appareils d'appui montre que le glissement de la poutre sablière de ces appuis sous l'effet des forces latérales exercées par la coque est peu probable. Il en est de même d'un éventuel basculement d'une ou plusieurs piles vers l'extérieur poursuit-elle.

Pour les experts, les causes de la catastrophes sont relativement claires. L'effondrement aurait été provoqué par la perforation de la voûte en béton par les butons (étais métalliques cylindrique) qui pénètrent d’environ 11 cm dans la coque en béton armé de 30 cm d’épaisseur. "Il est probable que cette perforation ait pu être préparée et facilitée par une dégradation préalable et progressive du béton", affirme le ministère de l’Equipement dans son communiqué.

"Les butons sont passés à travers la coque. Les tirants n’ont plus été soutenus. La coque s'est pliée sur elle-même et le bâtiment s'est effondré" a résumé Jean Berthier devant la presse. Une telle "pliure en portefeuille" des arcs pleins entourant les passerelles côté nord (côté isthme), provoque mécaniquement presque aussitôt, côté sud, la chute de la poutre sablière sur le tarmac a-t-il ajouté en commentant une série de photos où la cassure était particulièrement visible.

Les fameuses pliures se sont produites dans la partie qui avait été évidée pour permettre le passage des passerelles de liaisons avec les commerces. "C'est ces orifices là qui ont fragilisé la voûte", a-t-on également expliqué au cabinet du ministre.

Outre les causes originelles du phénomène de perforation, l'une des principales questions auxquelles doit encore répondre la commission est de savoir pourquoi "l'accident ne s'est produit que deux ans et quatre mois après la construction", s’est interrogé Jean Berthier. "Quand quelque chose est une faute de calcul ordinaire cela casse tout de suite ; quand cela tient pendant deux ans, cela veut dire qu'au fond c'était fait pour tenir, mais que, soit il eu une augmentation d'effort, soit il y a eu une diminution de résistance du matériau", a-t-il expliqué.

Pour les experts, et notamment Denis Aubry, professeur à l’école Centrale, cette fatigue du béton pourraient être due à des mouvements causés par de trop gros écarts de température. Sous la verrière, il se produit un effet de serre alors que l’intérieur du bâtiment est climatisé. C’est ce gradian entre l’intérieur et l’extérieur qui a provoqué des flexions de la voûte en béton et une diminution de la résistance.

Si cette explication est confirmée, c’est l’ensemble du bâtiment restant qui pourrait être rasé, comme certains ont avancé l’idée. Mais tant que les causes premières de l'effondrement n'ont pas été définitivement établies, aucune démolition de la jetée du terminal 2E n'est envisagée, a-t-on réaffirmé au ministère.

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