Attendu de pied ferme par les professionnels du négoce, le décret qui détaille les mesures relatives à la reprise par les distributeurs de matériaux des déchets issus des matériaux qu'ils distribuent, vient d'être publié et entrera en vigueur au 1er janvier 2017. A l'arrivée, ce n'est que colère et déception. Réactions.
Tous les efforts et actions de lobbying déployés depuis de longs mois par les professionnels du négoce et du commerce de gros auront été vains. Le décret n° 2016-288 du 10 mars 2016 vient anéantir, pour l'instant, leurs espoirs de voir se modifier la réglementation qui les oblige à devoir gérer leurs déchets.
En effet, celui-ci fixe les modalités d'application de l'article L. 541-10-9 du code de l'environnement, concernant l'obligation pour « tout distributeur de matériaux, produits et équipements de construction à destination des professionnels, qui exploite une unité de distribution, dont la surface est supérieure ou égale à 400 mètres carrés et dont le chiffre d'affaires annuel est supérieur ou égal à 1 million d'euros », d'organiser la reprise des déchets issus des mêmes types de matériaux, produits ou équipements de construction qu'il distribue.
Les GSB pas concernées
Sont donc précisément concernés les négoces, et non les grandes surfaces de bricolage comme le souhaitaient les professionnels de la distribution. Chez qui la colère a atteint aujourd'hui son paroxysme, eux qui pensaient avoir été entendus. « Malgré tous nos arguments techniques, nous n'avons pas été du tout entendus, nous confie, ce mardi 15 mars 2016, Hugues Pouzin, directeur général de la CGI. De son côté, Géraud Spire, président de la Fédération du négoce bois et matériaux, nous redit sa colère : "Ce décret est pratiquement à l'identique que celui présenté à l'origine. Pourquoi avoir autant attendu ? Nous sommes vraiment en colère, d'autant que j'avais réussi, en septembre dernier devant le Conseil supérieur de la construction, à faire entendre notre voix. Tant de discussions qui ne donnent aucun résultat ! Cette loi, je le répète, est inapplicable, et jamais on ne sera prêt pour le 1er janvier 2017!".
En avril dernier, Ségolène Royal avait reçu les organisations professionnelles qui demandaient à ce que soit retiré l'article relatif à cette disposition de reprise des déchets. Géraud Spire, président de la Fédération du négoce bois et matériaux, avait alors déclaré : « Pourquoi ce serait aux distributeurs de collecter les déchets alors qu'ils ne sont pas producteurs de ces déchets ? Ce n'est pas leur responsabilité ».
Contrainte de foncier levée ?
Cette mesure est en fait issue d'une directive qui indique que les collectivités doivent créer des déchetteries pour les artisans. En réalité, les artisans ont tendance à se débarrasser de leurs déchets de façon anarchique et lorsqu'il y a bien une déchetterie, on leur refuse souvent l'accès. C'est ce report de cette responsabilité non assumée par les artisans, « incompréhensible et voué à l'échec » que les professionnels du négoce et du commerce de gros n'ont cessé de démontrer ces derniers mois. Sans compter les raisons économiques qui peuvent être un réel frein : combien de bennes doivent être mises à disposition ? Sur quelle zone de terrain ?
A cela, le présent décret répond : « Cette reprise est réalisée sur l'unité de distribution ou dans un rayon maximal de dix kilomètres. Dans le cas où la reprise s'effectue hors de l'unité de distribution, un affichage visible sur [celle-ci] et sur son site internet quand celui-ci existe, informe les producteurs ou les détenteurs de déchets de l'adresse où se situe le lieu de reprise des déchets ».
Quoiqu'il arrive, l'échéance de 2017 était déjà trop courte dès le départ. La FNBM et la CGI doivent rencontrer d'autres acteurs de la profession ce mercredi et décider de la suite des événéments. "Sans surprise, nous devrions attaquer ce décret et déposer un recours devant le Conseil d'Etat, notre décision sera connue d'ici à la fin de cette semaine », nous confie Hugues Pouzin. La FNBM reste plus mesurée et attend de voir ce qu'il se passera ce mercredi. Et comme le rappelait le président de la CGI : « La reprise de déchets, c'est un métier ! »…