Le Centre hospitalier sud-francilien (CHSF), construit en PPP, vient de résilier le bail emphytéotique qui le lie au groupe de BTP Eiffage, a confirmé la direction du CHSF de Corbeil-Essonne. Cette résiliation conventionnelle pour motif d'intérêt général est effective depuis ce vendredi 14 mars 2014. Décryptage et réactions.
C'est bel et bien la fin du cauchemar pour le Centre hospitalier sud francilien (CHSF). "La communauté médicale de l'établissement et les représentants du personnel, réunis les 11 et 13 mars en séances exceptionnelles, se sont prononcés favorablement ce vendredi 14 mars sur le principe de cette sortie du bail emphytéotique hospitalier qui s'étendait à l'origine de 2006 jusqu'à 2041", ont confirmé Jean-Michel Toulouse, directeur du Centre hospitalier sud francilien aux côtés de Francis Chouat, président du Conseil de Surveillance, maire d'Evry et président de la Communauté d'Agglomération Evry Centre Essonne.
L'établissement, situé entre les villes de Corbeil-Essonne et Evry, a donc définitivement signé la résiliation du PPP qui le liait au groupe Eiffage, via sa filiale Héveil. En cause, les quelque 8.000 malfaçons relevées par des huissiers dans le bâtiment ouvert en 2012 après huit mois de retard.
L'établissement dans le viseur du dernier rapport de la Cour des comptes
Un rapport parlementaire, suivi d'ailleurs d'un document de la Cour des comptes, dévoilé le 12 février 2014 avaient épinglé le choix du PPP pour cette construction. Ce dernier rapport signalait les "réserves" de la direction ainsi que la "prudence" de l'Agence régionale de l'hospitalisation, à la signature de ce bail emphytéotique administratif hospitalier (BEH), soutenu fermement par la Direction des Hôpitaux de l'époque.
Comme nous l'annoncions le 27 février dernier, le projet de transaction soumis ce vendredi à l'avis des instances de gouvernance et de représentation du personnel du Centre Hospitalier Sud Francilien repose sur des engagements et des concessions réciproques.
Le choix des deux parties s'est arrêté sur une "résiliation conventionnelle pour motif d'intérêt général", souligne l'établissement hospitalier. La négociation a également acté le principe de l'extinction de tous les contentieux liés à l'exécution du bail. Les deux parties se sont accordées ainsi sur le principe d'une indemnité libératoire de 80 millions d'euros versée par le CHSF.
Toujours dans la négociation, Héveil a accepté de céder au CHSF la propriété du bâtiment, les contrats de crédit et de couverture de taux conclus avec ses prêteurs. C'est pourquoi, l'établissement hospitalier francilien retrouvera la maîtrise d'ouvrage pleine et entière sur la maintenance-exploitation au 1er octobre 2015.
Côté finances également, le CHSF ne sera plus redevable des conditions financières qui encadraient le règlement des loyers d'exploitation-maintenance versés à Héveil/Eiffage. Et de souligner : "Sur toute la période du bail emphytéotique hospitalier (BEH), soit jusqu'en 2041, la transaction proposée devrait générer une économie estimée entre 600 et 700 millions d'euros."
En détail : la société Héveil s'engage à réaliser en tant que maître d'ouvrage et à ses frais toutes les dégradations constatées. De plus, elle s'engage à installer à ses frais une solution de production d'énergie susceptible "d'optimiser la consommation énergétique du bâtiment en remplacement de la chaudière trigénération biomasse défectueuse." Enfin, les équipes d'Héveil réaliseront également sans contrepartie financière l'aménagement du Pôle D de l'hôpital (4ème étage du bâtiment) de sorte que le CHSF puisse ouvrir, avec les autorisations nécessaires, 75 lits supplémentaires à terme.
En reprenant la main, l'établissement public assure enfin que "l'ensemble de ces dispositions permettront à l'établissement de se positionner comme l'hôpital de recours du sud de la région Ile-de-France." De son côté, Eiffage, malgré les différends et les couacs, est "fier d'avoir financé, conçu et construit un hôpital exceptionnel, performant et doté des équipements les plus modernes, ce que confirment les enquêtes d'opinion et la direction de l'hôpital", nous avait confié fin février dernier, la porte-parole du groupe.
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L'urgence de sortir des PPP ?
Néanmoins, avec cette sortie du PPP de l'hôpital d'Evry, le débat autour de ce type de contrat appliqué aux bâtiments publics de grande envergure est toujours autant d'actualité. Les critiques pleuvent toujours. Sur 24 opérations réalisées au cours du plan Hôpital 2007 sous la forme d'un bail emphytéotique hospitalier, 4 opérations portent sur la réalisation d'un hôpital entièrement construit en PPP, à l'image également de la cité sanitaire de Saint-Nazaire, l'hôpital Alpes-Leman à Annemasse ou l'hôpital Pierre Oudot à Bourgoin Jailleu.
Parmi ces opérations passées au crible, la Cour et les chambres régionales des comptes ont encore conclu que ces procédures ont été "engagées de manière précipitée", et les avantages du PPP ont été "mal exploitées", avec des enjeux financiers "insuffisamment pris en compte".