Le mois prochain, la restauration du théâtre parisien de l’Odéon sera achevée. Visite de chantier en compagnie de l’architecte en chef des monuments historiques, Alain-Charles Perrot, avant réouverture de la salle en avril 2006.

«L’Odéon ne peut vivre ni mourir, c’est là son défaut. Il a des éclipses et des époques d’intermittences ; mais ses crises ne durent pas longtemps. Le moribond se reprend à la vie, sauf à retomber en léthargie quelques mois plus tard. Personne ne peut le tuer ni le ressusciter : il ouvre mais c’est pour fermer ; il ferme mais c’est pour rouvrir. Etrange existence !» (Théophile Gautier, 1829).

Le théâtre de l’Odéon, inauguré en 1782 et classé monument historique en 1947, était l'une des dernières grandes scènes publiques parisiennes à ne pas avoir fait l'objet d'une rénovation d'ensemble. Sa réhabilitation, d’un montant de 30 millions d’euros, a été conduite par le ministère de la Culture et l’EMOC (Etablissement public de maîtrise d'ouvrage des travaux culturels).

Pour Alain-Charles Perrot, architecte en chef des monuments historiques, «les travaux devaient répondre à trois objectifs : restaurer le monument (reconstruit à deux reprises après les incendies de 1799 et 1818), améliorer l’accueil du public (confort visuel depuis le parterre, climatisation, ajout de sanitaires), et doter la salle d’instruments scéniques qui correspondent aux spectacles d’aujourd’hui (gestion des décors, gril technique, régie)».

«Tout l’intérêt de cette opération a été de glisser des aménagements contemporains dans une structure historique, et de passer de la restauration des matériaux d’origine à l’utilisation du béton», estime Alain-Charles Perrot. Un exemple : derrière les dorures retrouvées du cadre de scène se dresse maintenant, au fond du plateau, un nouveau mur en béton.

D’une hauteur de 35 m pour 25 m de large, ce mur de fond de scène a été coulé d’une seule pièce au moyen d’un système de coffrage glissant, s’élevant sans interruption ni reprise depuis les fondations du 3ème dessous jusqu’à la toiture, à raison de 17 cm par heure. La création de cette paroi monolithique, permise par la suppression des anciens escaliers d’angle, augmente la profondeur de la scène de 3 m. Un gril technique, un plancher coupe-feu et une couverture à simple pente couronnent le vide de scène.

Par ailleurs, l’architecte en chef des monuments historiques a fait abaisser le plateau scénique d’une hauteur de 1,50 m pour être à l’horizontale avec le niveau de la rue, et ainsi faciliter l’acheminement des décors. Cette modification a entraîné un changement dans la disposition du parterre, avec aujourd'hui une pente qui offre une meilleure visibilité pour les spectateurs. De plus, le creusement du sous-sol a permis d’installer une fosse d’orchestre modulable et des espaces de stockage supplémentaires.

Outre la mise en place de sanitaires et d’un ascenseur d’accès pour les personnes à mobilité réduite, l’intervention sur le vestibule d’entrée a principalement consisté à retrouver l’aspect d’origine des murs, des colonnes et des plafonds en pierre, recouverts au fil du temps par une couche de peinture d’environ 1 cm d’épaisseur. Un nouvel éclairage, dissimulé par des corniches en fausse pierre, les met en valeur.

Fin novembre, les restaurateurs laisseront place aux techniciens pour le rodage de la salle. Le premier spectacle est programmé pour avril 2006, avec une mise en scène de Georges Lavaudant : «Un songe» d’après William Shakespeare.

(c)Laure Vasconi/EMOC/Théâtre de l'Odéon

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