Ils s'appellent "archionline.com", "architecte-online.fr", "Houzz" et commercialisent des plans d'architectes en ligne… Cette activité sème la panique dans la profession. Le Conseil national de l'Ordre des architectes (CNOA) a même adressé une sévère mise en garde aux sites web mettant en vente ces plans à prix cassés, galvaudant selon lui le travail des professionnels. Explications et réaction d'un éditeur de site web.
Face à la création de sites Internet mettant en vente des plans d'architectes à "prix cassés", galvaudant le travail de l'architecte, le Conseil national de l'Ordre (CNOA) tire la sonnette d'alarme. François Rouanet, vice-président du CNOA a adressé ces mois-ci plusieurs courriers aux sites web* qui commercialisent des plans en ligne.
"Le CNOA n'accuse pas ces sites mais souhaite les recadrer"
D'après Jean-François Rouanet, l'activité des courtiers spécialisés en plans d'architectes sur Internet n'est pas réglementée : "Tout d'abord, je tiens à dire que je n'accuse pas ces sites, mais je souhaite, en revanche, les recadrer, car ils ne peuvent pas se comporter ainsi dans notre secteur (...) Nous sommes une profession réglementée qui est très attentive au droit du titre, au transfert du droit d'auteur et également à la protection du consommateur."Le CNOA demande donc à ces sites de corriger la présentation de leur activité. "En particulier, l'utilisation du titre d'architecte à des fins commerciales, qui est ici de nature à entretenir la confusion dans l'esprit du public en lui laissant croire que ces sociétés sont des sociétés d'architecture, nous précise-t-il. Je rappelle en outre que, conformément à la législation en vigueur en matière de modèles-types, le nom de l'architecte qui est l'auteur des plans doit systématiquement être présent sur ces documents."
L'Ordre tient à rappeler, par exemple que le site Archionline (spécialiste de la maison individuelle) ne donne aucune garantie sur les plans diffusés, notamment en matière d'exécution de travaux et de constitution de dossier pour obtenir un permis de construire. En outre, François Rouanet avertit ces sites contre toute incitation à la signature de complaisance. Cette dernière est sanctionnée par l'Ordre et tout architecte s'y prêtant encourt une interdiction de porter le titre ainsi que des sanctions pénales pour faux ou usage de faux.
Enfin, l'Ordre demande "expressément" à Archionline de cesser de légitimer sa démarche commerciale, tant auprès des architectes, qu'auprès de ses prospects, en prétendant bénéficier d'une quelconque caution de l'Ordre des architectes.
Une activité à la portée de tous
Face à ces reproches, le président-fondateur du site visé nous a répondu du tac au tac : "Il est normal que l'Ordre précise certains points, mais nous trouvons dommage qu'il limite notre présentation à de la vente de plans."Et de poursuivre son argumentaire : "Plutôt que de galvauder le travail de l'architecte, Archionline tente de le rendre accessible aux particuliers. Notre promesse a toujours été de casser cette image élitiste et 'hors de prix' qu'a le particulier de l'architecte. Rien ne nous rend plus fier qu'un particulier qui découvre notre site, y achète un plan et travaille par la suite avec l'architecte créateur pour son projet." Est-ce négatif de proposer une nouvelle manière de valoriser le travail de l'architecte sur la maison individuelle ? interroge également cet éditeur de logiciels applicatifs.
Selon ce dernier, la commercialisation des plans constitue la première étape avant de faire appel à l'architecte. "Nous ne pensons pas que la valeur ajoutée de l'architecte se résume à réaliser des plans, auquel cas les architectes seraient des dessinateurs, ajoute-t-il. La vraie valeur de l'architecte est sa capacité à s'adapter à un environnement (aussi contraint soit-il), à un budget, et surtout à un mode de vie ?"
Avant de s'exaspérer de la polémique : "Il est dommage d'être considéré comme un 'parasite' quand nous travaillons avec des architectes pour défendre leur profession. Notre business model dépend principalement des constructions réalisées par nos architectes partenaires et cela en respectant le code déontologique de l'architecture."
"Ni architectes, ni constructeurs mais un outil"
Une question persiste : sur quel modèle vit Archionline ? A cette interrogation, le jeune dirigeant nous explique : " Je précise à l'Ordre qu'on ne verse aucune commission du chiffre d'affaires aux architectes. Le téléchargement d'un projet coûte aux consommateurs environ 300 euros sur lesquels on reverse 50 % du chiffre d'affaires à l'architecte et l'autre moitié assure notre activité."Enfin, ce site web souhaite être clair sur quatre points: "Nous sommes plus qu'un courtier en plans, nous sommes un nouvel outil pour les architectes ; Notre objectif n'a jamais été de galvauder le travail de l'architecte mais bien de rapprocher les particuliers des architectes pour leurs projets; notre système permet de placer les architectes sur un mot clé recherché par les particuliers "Plan de maison" où les architectes sont aujourd'hui peu représentés et enfin, nous insistons sur le fait que nous ne sommes ni architectes, ni constructeurs mais un outil."
Reste que le CNOA ne semble pas convaincu. Ce dernier espère que ce rappel à l'ordre sera entendu chez les courtiers de plans en ligne. "Il fallait réagir vite car on observe aujourd'hui des affaires litigieuses auxquelles des architectes sont victimes. Déjà que la profession est touchée par l'activité économique, on doit avertir et puis sévir au cas où !", glisse François Rouanet.
* Ils s'appellent "archionline.com", "architecte-online.fr", "Houzz" et commercialisent des plans d'architectes en ligne.